Ah ! L’ Alsace, ses habitants chaleureux, ses paysages, ses vins, ses spécialités culinaires ! En tant qu’expat’, je ne pouvais rêver mieux comme endroit où atterrir.
Qui n’a jamais rêvé de s’installer tranquillement pour déguster une appétissante choucroute, ou bien une délicieuse flammekueche… ou tarte flambée ! En effet, on voit de plus en plus sur les cartes des restaurants flammekueche traduit par tarte flambée, comme si les touristes étrangers pouvaient mieux comprendre comme ça, mais les pauvres, ça doit les perdre encore plus. Et moi, ça m’en dénaturerait presque le gout, de ma tarte, même si j’avoue ainsi ne pas avoir à me tordre la langue pour réussir à la commander. Heureusement, en tout cas, le fameux baeckeoffe n’est jamais traduit sur la carte, c’est vrai que four du boulanger c’est tout de suite moins appétissant (voir Rézeau, P. (1999). Variétés géographiques du français de France aujourd’hui: approche lexicographique. De Boeck Supérieur.).
Quant à la choucroute, dont le nom même provient de l’alsacien surkrut (http://www.cnrtl.fr/etymologie/choucroute), mot à mot saur (oui, oui, comme le hareng saur), ou sure, (http://www.cnrtl.fr/definition/sure) – chou (ou herbe), devenu chou-croute par étymologie populaire, le mot est complètement rentré dans la langue et assimilé au français.
Mais il n’y a pas que les spécialités culinaires, il y a aussi les autres. Un ami qui proposait un jour d’emmener en ballade une jeune fille charmante, lui proposa d’emmener avec elle son schatz (prononcez entre [a] et [o]). Contrairement à ce que j’ai pu imaginer, c’était finalement une manière assez joliment détournée de lui demander si elle en avait un, de copain, et non pas de chat, comme me l’a expliqué ensuite le mien, de schatz.
Un autre mot que, n’habitant pas avec des alsaciens, je n’ai pour ma part jamais entendu en situation, mais qui est bien représenté, ce sont les schloppe par exemple (prononcez le [o] très ouvert, et prononcez bien le [e] final), pour ne pas avoir froid à ses petits pieds l’hiver, autrement dit les chaussons, qui est aussi un emprunt à l’alsacien, mais qu’on retrouve pourtant en Suisse romande.
De même encore schluck, emprunt à l’alsacien, et ça, il m’est devenu complètement familier, même si je ne demande pas un(e) schluck à n’importe quel inconnu ! Et finalement, justement, celui-là, il s’est bien étendu hors de sa région d’origine, c’est vrai, quoi, il est pratique comme mot ! Quoique je ne sais pas si le fameux ouvrage de Philippe Delerm aurait eu la même saveur s’il s’appelait La Première schluck de bière et autres plaisirs minuscules…
Mais en dehors des emprunts à l’alsacien, le français en Alsace connait aussi d’autres variations, que ce soit par influence du contact de langue, ou juste variation régionale du français. C’est le cas avec le sachet (voir ici), et ça je peux vous dire qu’on a vite fait de l’adopter, vu qu’on l’utilise à chaque fois qu’on fait les courses. Et cette fois-ci, on remarquera que la variante alsacienne n’est pas partagée avec la Suisse, mais plutôt avec la Belgique. Comme quoi, même les frontières linguistiques peuvent bouger selon les mots.
Une autre spécialité alsacienne que n’importe quel expat’ vous dira avoir adopté très facilement, c’est le « comme dit ».
Ainsi, certains mots voyagent mieux que d’autres, la flammekueche est notamment plus connue ailleurs que le baeckeoffe, qui est très peu utilisé, voire mangé, ailleurs, mais ça, ça n’a finalement rien d’étonnant, puisque chaque région a sa propre potée !